Voyager par les livres

Vous ne partez pas en vacances, ou pas tout de suite ? Les livres sont de fabuleux moyens d'évasion ! Bénédicte Junger, bibliothécaire à la Médiathèque du Neuhof, vous propose une sélection de cinq romans dépaysants, du Québec au Tibet en passant par New York et l'Alaska.

Strasbourg, Capitale Mondiale du Livre UNESCO 2024

Cet article a été rédigé pour le blog du site lire notre monde dans le cadre de l'année de labellisation Strasbourg Capitale Mondiale du Livre UNESCO 2024.

Nous vous proposons de le (re)découvrir !

Quand la littérature devient un territoire d’évasion

Chaque livre devient une porte ouverte sur un ailleurs. Qu’il s’agisse de forêts enneigées, de villes lointaines ou de contrées imaginaires, ces récits nous font voyager sans quitter notre fauteuil.

Une belle façon de découvrir le monde à travers les yeux de celles et ceux qui l’écrivent !

Quelques recommandations

Kukum

Michel Jean

Dans ce roman d’aventure et de grand froid, Michel Jean nous emmène à la rencontre de son arrière-grand-mère, Almanda Siméon. Née en 1882, la jeune orpheline est élevée au Québec par un couple de fermiers, jusqu'au jour où elle rencontre Thomas, un indien Innu. Tout juste âgée de quinze ans, elle décide de le suivre par amour. Elle embrasse alors le mode de vie de ce peuple autochtone. C'est à hauteur de femme et à la première personne que l’on découvre le mode de vie de cette communauté nomade qui vit en symbiose avec la nature mais aussi de ses ressources : chasse et pêche. Véritable invitation au voyage mais aussi à vivre au rythme lent des saisons et à respecter le vivant, ce roman offre de belles pages sur la liberté insatiable de ce peuple nomade. Dans une deuxième partie Michel Jean évoque aussi la fin progressive de ce mode de vie traditionnel avec l'arrivée de la déforestation, la sédentarisation forcée, l'introduction de l'alcool ou l'envoi des enfants autochtones dans des pensionnats. Kukum est un roman initiatique fort et profondément ancré dans la nature auprès de deux jeunes gens libres et fougueux mais aussi très respectueux du vivant et des traditions.

Les trois filles du Capitàn

Maria Duenas

Voici une grande fresque féministe et historique dans un New-York cosmopolite où l'on démystifie le rêve américain avec finesse et psychologie. María Dueñas nous emmène au cœur du New-York des années 30, dans le quartier des immigrés espagnols, auprès de trois sœurs et de leur mère, fraîchement débarquées dans la grande ville. Le père de famille est décédé d'un accident dans la zone portuaire. Rapidement, Remedios et ses filles doivent se débrouiller toutes seules pour gagner leur vie et se faire une place dans cette ville cosmopolite. Les nombreuses pages aux descriptions colorées invitent à découvrir le New-York des beaux quartiers mais aussi celui des oubliés du rêve américain. À travers le destin de jeunes Espagnoles, l’auteure rend hommage à toutes les femmes qui ont eu le courage de vivre la grande aventure de l’émigration. Un grand roman sur les espoirs et les déboires de trois jeunes femmes qui résonnent très fort avec les défis d'intégration d'aujourd'hui.

La panthère des neiges

Sylvain Tesson

Sylvain Tesson, voyageur infatigable, poète de la nature nous emmène à la recherche de la panthère des neiges aux confins du Tibet et c’est percutant de beauté, de symbolisme et d’envie d’ailleurs. Ce livre est le récit de cette expédition en terre inconnue, balayée par les vents, brulée par les UV et glacée par les températures flirtant avec les -40°. L’auteur y parle de ces jours passés à attendre. Il invite le lecteur à changer de rythme, à s’émerveiller, à entre apercevoir la lumière de la beauté de la nature. Il accompagne Vincent Munier, célèbre photographe animalier dont le livre "Tibet minéral animal" retrace en photographies et avec ses poèmes cet incroyable voyage à la rencontre de soi.
Ce livre est une invitation à ralentir, à observer et à apprendre à vivre le temps présent. En partant d’une expérience personnelle aux confins du Tibet, Sylvain Tesson nous parle de nous, et de notre société déconnectée de la nature et paradoxalement ultra connectée.

Voyage d’une parisienne à Lhassa

Alexandra David-Néel

1924. Pour la première fois, une femme étrangère réussit à entrer dans Lhassa, capitale interdite du Tibet ! Nous sommes en octobre 1924 et Alexandra David Néel entreprend de se rendre à Lhassa à pied, en partant du Yunnan en Chine, soit une expédition de huit mois à travers l'Himalaya. Elle mène une traversée rude et dangereuse sous l'apparence d'une mendiante tibétaine car l’entrée des étrangers est interdite. Il lui faut affronter le froid, la neige, les tempêtes, la faim, coucher à même le sol, à l'abri d'un buisson et surtout la crainte de se faire arrêter par les autorités. Son récit diffuse un enthousiasme intact, un certain sens de l’humour et surtout ce regard émerveillé ce qu’elle découvre. Un récit de voyage d’une véritable aventurière à la liberté folle pour l’époque.

Le grand marin

Catherine Poulain

On rêve souvent de tout quitter, partir, larguer les amarres. Catherine Poulain l’a fait. Pendant 10 ans, elle a péché en Alaska dans des conditions extrêmes, repoussant chaque jour un peu plus loin ses propres limites. Elle publie son premier roman inspiré par les cahiers qu’elle a tenu durant toute sa vie. Le grand marin est un livre intense où vents contraires et tempêtes n’ont jamais autant permis d’avancer non seulement à la rencontre des autres mais aussi dans la connaissance de soi-même. L’auteure esquisse à travers ce roman généreux le parcours d’une femme qui fuit et court après un absolu de vie. La voie qu’elle emprunte pour épouser ce mode de vie c’est l’errance en mer, la pêche et une lutte permanente contre le déchaînement des éléments dans un fonctionnement ordonné et une solidarité entre pécheurs à toute épreuve. Des pages magnifiques sont consacrées à la pêche et à la mer. Avec une plume vive et une économie de mots, elle écrit des passages inspirés et inspirant sur l’immensité bleue et la place de l’homme en Alaska. Un roman d’aventure, âpre et réaliste qui flirte avec des réflexions spirituelles et invite au questionnement personnel.

Un lecteur vit mille vies avant de mourir. Celui qui ne lit pas n’en vit qu’une.

George R.R. Martin